Après avoir affronté les Nazis durant la Seconde Guerre Mondiale, puis pris un congé sabbatique d'un quart de siècle avant de se reconvertir en agente du contre-espionnage, Diana Prince alias Wonder Woman revient dans une troisième et dernière saison où il faut croire que ses adversaires habituels ont tous décidé de faire grève.
Ah, zut! Qui je vais affronter, moi, du coup?
Aucune idée!
Allo, Méchants Interim? Vous avez des adversaires à me proposer et à m'opposer?
Et faites vite : mon patron s'ennuie tellement qu'il passe ses heures de bureau à jouer au golf ...
... et à faire des avions en papier.
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En effet, après avoir affronté pendant deux saisons des espions, des saboteurs, des terroristes, des dictateurs, des savants fous et même des super-vilains, la merveilleuse Amazone se contente désormais de simples voleurs quand elle ne se la joue pas anticapitaliste en se mesurant à des criminels en cols blancs s'intéressant moins à la conquête du monde qu'à leur enrichissement personnel, qu'il s'agisse d'un industriel commercialisant un insecticide en ignorant les avertissements comme quoi il serait encore plus toxique que le DDT (dans le même style, un épisode aurait dû l'opposer à une société fabriquant des cosmétiques dangereux mais l'idée fut abandonnée car Lynda Carter était à l'époque la porte-parole de Maybelline), d'une historienne venue du futur prête à rayer une ville de la carte pour pouvoir exploiter une source d'énergie encore inconnue qui la rendrait richissime, ou d'entrepreneurs recourant à la menace et au sabotage pour obliger des propriétaires à leur céder leurs biens. Autrement dit, on est passé des méchants de James Bond à ceux de Scooby-Doo.
Oh, la belle prise!
Ce moment gênant où vous rattrapez la voiture d'un fuyard ...
... pour réaliser ensuite que ce n'est pas la bonne.
Woups, bavure!
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Et là, vous vous demandez: "Mais Diana Prince travaille pour l'I.A.D.C. qui est une agence de contre-espionnage. Pourquoi gaspilleraient-ils l'argent du contribuable sur des enquêtes dont Columbo pourrait s'occuper?" Hé bien, de temps en temps, les scénaristes arrivent à le justifier par le fait que les criminels utilisent ou ont volé une technologie qui représente une menace potentielle pour la sécurité nationale, ou parce qu'ils s'en prennent à un industriel qui à des contrats avec le gouvernement. Mais la plupart du temps, l'implication de Diana Prince est terriblement forcée, avec des justifications du style : "un microfilm est caché dans la voiture qui a été volée", "la fille du type qui vient d'aider Diana à déjouer un projet d'attentat a assisté à l'enlèvement d'une star de la chanson", "une des personnes impliquées dans l'affaire était déguisée en Wonder Woman", "le type qui veut forcer le propriétaire d'un parc d'attraction à le lui vendre est le chef d'un réseau d'espionnage" ou encore "la criminelle sur laquelle on enquête est aussi impliquée dans une affaire d'extorsion dans le monde de la chanson".
Ce qui permet à Lynda Carter d'interpréter quelques titres de son album.
Oh, mon dieu! Ils ont cloné un chanteur pour midinette!
Oh, mon dieu! Ils ont cloné le Joker!
Et on s'en serait tiré si ce groupe de rock ne s'en était pas mêlé.
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C'est bien simple : durant toute la saison, Wondy ne croisera que trois adversaires à sa hauteur, dont deux se révéleront assez frustrants. La première est Irene Janus alias Formicida, une version écoterroriste du Dr Jeckyll et Mr Hyde qui utilise sa superforce et son contrôle sur les fourmis pour empêcher la mise en vente d'un insecticide qu'elle sait dangereux. Comme le premier affrontement contre Wonder Woman se termine à l'avantage de Formicida, le spectateur s'attend légitimement à un match retour entre les deux mais lorsqu'elles se retrouvent à nouveau face à face, Formicida perd ses pouvoirs (ce qui fait passer la forme de Formicida de formidable à fort minable) et s'allie à Wondy pour détruire les stocks d'insecticide.
Comme le dieu dont elle porte le nom, Irene Janus possède deux visages : celui d'une scientifique timorée ...
... et celui d'une super-vilaine.
Ses fourmis sont pires que des termites!
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Le deuxième est certainement l'antagoniste le plus mémorable de la série : Harlow Gault, un industriel misanthrope et égocentrique dont le cerveau maintenu en vie après sa mort a développé de vastes pouvoirs télékinétiques et qui se cherche un nouveau corps pour reprendre le contrôle de son entreprise. Hélas, là encore, la confrontation finale tant attendu entre lui et la princesse amazone fait long feu et quand ils se retrouvent enfin face à face (ou plutôt face à cervelle), le cerveau maléfique se la pète en insistant sur combien il est plus fort qu'elle ... avant de se barrer en lui balançant divers objets pour faire diversion. Dégonflé, va!
Le cerveau de l'opération.
L'opération du cerveau.
Il s'en est fallu d'un cheveu!
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Finalement, il faut attendre la quasi-fin de la saison pour avoir enfin un adversaire bien exploité dans un double épisode inspiré de
Invasion of the body snatchers dont le remake était sorti quelques mois auparavant. Diana Prince s'y rend dans la ville de Crystal Lake (Rien à voir avec
Jason Voorhees qui n'existait pas encore) pour enquêter sur des tétraèdres extraterrestres qui échangent leurs esprits contre ceux des habitants. Si ce point de départ rappelle celui d'un autre double-épisode de la saison précédente,
Mind stealers from outer space, la deuxième partie nous révèle que malgré leurs méthodes discutables, les Tétraèdres sont les "gentils" de l'histoire et sont venus sur Terre pour capturer un tueur polymorphe qui se transformera en une créature mi-homme mi animal dotée d'une force colossale pour affronter Wonder Woman.
Surtout, ne touchez pas les Tétraèdres ...
... vous finiriez par avoir la tête ailleurs.
Sa collection est presque complète.
Le polymorphe n'a pas une tête de porte-bonheur.
Allez, coucouche panier!
Zut, je me suis fait eu.
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Comme adversaires notables, on retiendra également un faux sculpteur dont les statues sont en réalité des voleurs en animation suspendue qui dérobent des œuvres d'art pour son compte tandis qu'il nargue Diana Prince en lui envoyant des indices sur ses futurs méfaits sous forme d'énigmes.
Des indices sous forme d'énigmes?
Il faudra vérifier l'alibi d'Edward Nygma.
Le réalisme de cette statue ...
... est réellement renversant.
Wondy elle-même en est médusée.
Sa place est dans un musée.
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Ainsi qu'un danseur télépathe voleur de souvenirs habillé comme John Travolta dans
Saturday Night Fever et opérant dans une discothèque. Un concept plus 70s, tu meurs pour un supervilain qui ne croisera pour ainsi dire jamais Wonder Woman de tout l'épisode, à part dans un bref passage où elle le désarme à distance. D'ailleurs, à la différence de la saison précédente qui arrivait à rester assez intemporelle, celle-ci s'efforce tellement de surfer sur les modes de l'époque (disco, variété, skateboard) qu'elle paraît aujourd'hui terriblement datée.
Bon retour dans les années 70! Elles vous avaient manqué?
De la fièvre, vous dites? C'est normal : on est samedi soir.
Après Wonder Woman fait de la plongée ...
... et Wonder Woman fait de la moto ...
... Wonder Woman fait du skateboard.
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Néanmoins, devant le peu d'adversaires dignes de ce nom, j'en viens à soupçonner les auteurs de cette saison de ne pas avoir voulu faire du Wonder Woman. La preuve : le nombre élevé d'épisodes qui préfèrent se concentrer sur un personnage secondaire plutôt que sur l'héroïne. Dans certains cas, ça passe car Wondy et le personnage en question sont d'importance égale tout en agissant chacun de leur côté (Le Leprechaun
Pat O'Hanlon, le duo formé par le milliardaire dépossédé
Marshall Henshaw et le SDF
Barney, la porte-poisse
Bonnie Murphy, le vétéran défiguré
David Gurney et son jeune ami
Randy) ou bien parce qu'ils forment un duo complémentaire (le visiteur du futur
Adam Clement), mais il y a aussi des épisodes où l'amazone se retrouve à jouer les seconds couteaux dans sa propre série pendant que son partenaire du jour fait le gros du travail, capturant même les méchants à sa place dans les cas les plus extrêmes (
Tim Bolt,
Delbert Franklin,
Antimatter)! On en arrive même parfois à des épisodes où elle ne croise jamais le méchant du jour! Un peu comme si le scénario avait été écrit pour être centré sur un autre personnage et qu'on avait rajouté Wonder Woman à la dernière seconde.
Par conséquent, alors que dans les deux saisons précédentes, rares étaient les épisodes où Wonder Woman n'accomplissait pas au moins un exploit ou un tour de force marquant, elle peut désormais passer des épisodes entiers à ne rien faire alors que, paradoxalement, les auteurs ont fait des efforts pour les scènes de combat où elle n'hésite plus à frapper ses adversaires et que Lynda Carter exécute désormais en majeure partie elle-même.
En outre, Wonder Woman semble de moins en moins concernée par son identité secrète. Passe encore que dans la saison précédente, elle s'était rapidement mise à ne plus porter ses lunettes qu'occasionnellement car on n'avait aucun mal à admettre que la différence de coiffure suffisait à empêcher les gens de la reconnaître; mais dans cette saison, il lui arrive de porter une coiffure quasi-identique à celle de Wonder Woman en tant que Diana Prince pendant des scènes voir des épisodes entiers sans que personne ne remarque la ressemblance!
L'hypothèse que les gens regardent rarement son visage est évidemment envisageable.
Chut, je suis ici incognito!
Pour les lunettes, je suppose que son ophtalmo en avait assez de lui faire des ordonnances de complaisance.
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Et ce qui devait arriver finit par arriver: quelqu'un découvre son identité secrète, en l'occurrence un lycéen qui l'assiste durant l'affaire des Tétraèdres: Steven "Skip" Keller. Fait surprenant pour l'époque: le statu quo n'est pas rétabli à la fin du double épisode. Oh, Wonder Woman utilise bien son lasso magique pour faire oublier sa double identité à Skip mais l'épisode se termine alors qu'il retrouve l'information dans son journal intime.
La première fois, ça surprend toujours.
Voilà que Skip voit double, en plus.
La conclusion nous révèle qu'il a gardé une photo de Diana (ce qui fait à peine stalker) ... dont on ne sait absolument pas comment il l'a obtenue!
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En fait, il semble que ce double épisode aurait dû être le dernier de la saison qui se serait ainsi terminée sur un cliffhanger, mais aussi sur la promesse que Skip reviendrait dans la saison suivante, Diana lui ayant annoncé qu'elle allait être mutée à Los Angeles, ce qui leur aurait permis de se revoir. Et effectivement, dans l'épisode suivant, on la voit emménager à L.A. et faire connaissance avec ses nouveaux collègues.
Enchanté, nous sommes les nouveaux personnages récurrents de la série.
... et adepte de la vente sous le manteau ...
... ainsi qu'avec un singe immortel (véridique!) ...
... dont les cascades auraient été assurées par Kiki.
OK, finalement, c'est pas une si mauvaise chose qu'il n'y ait pas eu d'autre saison!
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Et surtout, cet épisode introduit Bryce Kandell, un athlétique professeur d'informatique rendu immortel par certaines expériences et qui, dans la conclusion, rejoint le département informatique de l'I.A.D.C. sous l'identité de Bret Cassiday (Sauf qu'il ne change pas du tout son apparence, rendant cette fausse identité inutile puisque tout le monde peut le reconnaître). Il était évident qu'avec lui, les auteurs voulaient donner à Wonder Woman un partenaire à superpouvoirs qui leur aurait permis de mettre un équivalent de Superman dans la série sans pour autant mettre Superman (Au cas où vous auriez des doutes, certains dialogues comparent clairement Bryce au dernier fils de Krypton sans le nommer). Malheureusement, si le fait qu'il vit son immortalité comme une malédiction en fait un personnage tragique et intéressant, son absence totale de point faible (comme la kryptonite ou la magie pour Superman) fait qu'il est impossible de le mettre en danger, annihilant donc toute tentative de suspense. On en arrive même au point où les scénaristes oublient parfois qu'il est censé être invulnérable!
Alors que Superman est vulnérable à la magie, Bryce est immunisé contre les pouvoirs du lasso de Wonder Woman.
Je proteste: le "ta gueule, c'est magique" est prioritaire en toute circonstance!
Ceci dit, il pourrait être utile si un jour ses bracelets tombaient en panne.
Ah, c'est ballot: il a oublié qu'il ne craignait pas les flammes!
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Quoi qu'il en soit, cet épisode aurait dû être le premier d'une saison 4 jamais concrétisée et sera finalement ajoutée à la 3 dont il aurait pu constituer une parfaite conclusion ... Sauf qu'à l'époque, les chaînes se souciaient peu de la continuité et de l'ordre de diffusion des épisodes, ce qui fait qu'au lieu de ça, la série se termine par un dernier double-épisode où Diana travaille à nouveau à Washington sans la moindre explication!
- Ben? Vous étiez pas à L.A., aux dernières nouvelles? - Laissez tomber, même moi j'y comprend rien.
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Quant à savoir si l'absence de saison 4 est une bonne ou une mauvaise chose, difficile à dire. Certes, le personnage de Bryce est difficilement exploitable et le nouvel entourage de Diana Prince annonçait un virage nettement plus humoristique; mais peut-être que les auteurs avaient seulement besoin de quelques épisodes pour trouver leurs marques? On ne le saura jamais.
C'était pas gagné, en tout cas.
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Par la suite, avant de devenir l'héroïne du film à succès que l'on connaît, Wonder Woman allait tenter de revenir sur le petit écran en 2011 via une série qui n'alla pas au-delà d'un pilote même pas finalisé mais dont on peut facilement trouver une version pirate qui nous permet de comprendre pourquoi les auteurs ont préféré jeter l'éponge car si on excepte l'assez bon choix de casting de confier le rôle de l'amazone à Adrianne Palicki qui a tout à fait le physique du rôle une fois teinte en brune, ce pilote est une catastrophe qui transforme Wonder Woman en une véritable tarée qui tue et torture ses adversaires sous les applaudissements du public, le tout dans un premier degré total!
La première version du costume avait été tellement décriée que les auteurs s'étaient empressés de la modifier ...
... alors que certaines scènes avaient déjà été tournées, donnant ainsi naissance au meme "pants to be darkened", cette indication qu'il fallait assombrir numériquement le pantalon pour éviter un faux raccord devenant une parabole involontaire de la volonté des auteurs d'assombrir le personnage.
Et comme le costume modifié était tout aussi critiqué, les auteurs avaient promis-juré qu'ils avaient dès le début prévu plusieurs tenues, dont une plus proche de celle des comics.
Ça se voit à peine que vous l'avez confectionnée en catastrophe, les gars. À peine.
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Enfin, suite au succès de
Batman '66, un comics se déroulant dans l'univers de la série télévisée avec Adam West, DC avait tenté d'appliquer la même recette à la princesse amazone avec
Wonder Woman '77 en 2015. Malheureusement, à l'exception d'un excellent crossover avec
The Bionic Woman (Super Jaimie) scénarisé par Andy Mangels, cette série ne tient pas ses promesses et échoue à retrouver l'esprit et le charme de la série télévisée.
Souvent imitée, jamais égalée ...
... la série télévisée est toujours aussi populaire 40 ans après.
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